la Commission d’indemnisation des Victimes d’infraction

Un régime d’indemnisation autonome ouvert à certaines victimes de dommages résultant d’une infraction.

Toute personne ayant subi un préjudice résultant de faits volontaires ou non qui présentent le caractère matériel d’une infraction peut obtenir la réparation intégrale des dommages qui résultent des atteintes à la personne devant une commission appelée Commission d’Indemnisation des Victimes d’Infraction ou CIVI.

En effet, toute personne victime de faits tels que agressions physiques ou sexuelles, violences volontaires ou non, faits pouvant être qualifiés de crime, de délit ou même de contravention, et ayant entrainés des blessures physiques ou psychiques peut être indemnisée de ses préjudices :

Alors même que l’agresseur ou l’auteur présumé de l’infraction est demeuré inconnu, qu’il n’a pas été effectivement poursuivi ou qu’il ne peut l’être en raison de son décès ou de sa démence.

Alors même que les faits sont prescrits ou couverts par l’amnistie.

Cette indemnisation est soumise aux conditions suivantes :

les dommages ne doivent pas résulter d’un accident de la circulation (loi du 5 juillet 1985, sauf si l’accident est volontaire voir arrêt Cour d’Appel de Grenoble 11 février 2008, la CIVI redevient compétente) ni d’un accident de chasse.

les faits doivent avoir entrainés soit une incapacité totale de travail personnel égale ou supérieure à un mois, soit une incapacité permanente, (soit la mort et dans ce cas, les demandeurs  à l’indemnisation sont les ayants droits).

A noter que certaines victimes n’ont pas à justifier d’une incapacité totale de travail pour pouvoir être indemnisées : victimes d’agressions sexuelles ou de viol, mais aussi d’infractions dites de traite des êtres humains (victimes du proxénétisme, victimes exploités pour la mendicité, victimes de conditions de travail ou d’hébergement contraire à la dignité).

La personne victime doit être de nationalité française, et dans le cas contraire, les faits doivent avoir été commis sur le territoire national et la personne victime doit être ressortissante de la CEE, ou en séjour régulier.

Attention, les dispositions légales d’ordre public sur la réparation des accidents du travail excluent les dispositions propres à l’indemnisation des victimes d’infraction, sauf si l’accident du travail est imputable à une personne autre que l’employeur ou ses préposés (Civ 2e 7 mai 2003 et Civ 2e29 avril 2004, CA Grenoble 2e civ du 5 novembre 2007 pour une agression sexuelle sur lieux de travail).

Depuis le revirement intervenu le 7 mai 2009 (Cass civ 2ième n°08-15.738, confirmé par Cass Civ 2ième 4 février 2010), les dispositions propres à l’indemnisation des victimes d’infraction sont applicables aux victimes d’un accident du travail, imputable à la faute intentionnelle de l’employeur ou de l’un de ses préposés.

Ces victimes peuvent prétendre à la réparation intégrale de tous les dommages qui résultent des atteintes à leur personne. Ainsi, l’indemnisation couvre l’ensemble des incidences de l’atteinte à l’intégrité corporelle qu’elles soient d’ordre pécuniaire ou extrapatrimonial.

Sont ainsi indemnisés au titres des dommages patrimoniaux : la perte de gains professionnels, la perte la perte du soutien financier que la victime apportait à ses proches, les frais et dépens causés par le fait dommageable (frais médicaux, d’hospitalisation, pharmaceutiques, d’appareillages et d’aménagement des lieux de vie, recours à une tierce personne, frais d’obsèques en cas de décès de la victime).

Sont ainsi indemnisés au titre des dommages extrapatrimoniaux : l’incapacité temporaire et permanente ou déficit fonctionnel temporaire et permanent, les souffrances physiques et morales endurées, le préjudice esthétique, le préjudice d’agrément, le préjudice sexuel, le préjudice d’établissement et le préjudice d’affection en cas de décès de la victime.

A noter que la faute de la victime peut réduire ou supprimer l’indemnisation si cette faute a permis la réalisation du dommage subi.

L’indemnité est allouée par une commission instituée auprès de chaque tribunal de grande instance qui se prononce par une décision susceptible d’appel.

Cette commission est composée de deux magistrats du tribunal et d’une personne s’étant signalée par l’intérêt qu’elle porte aux problèmes des victimes.

La demande doit être présentée dans un certain délai : La demande d’indemnisation doit être présentée à cette commission dans le délai de trois ans à compter de la date de l’infraction.

Lorsque des poursuites ont été exercées, ce délai de trois ans est prorogé (allongé) pour n’expirer qu’un an après la décision définitive de la juridiction pénale qui statue sur l’action publique ou sur l’action civile engagée devant la juridiction répressive.

Si la victime a laissé expirer ce délai et est donc forclose, elle peut cependant ressaisir la CIVI de l’indemnisation de son entier dommage, en cas d’aggravation de préjudice Cass Civ 2ième 1er juillet 2010 n° 09-68578, dans les trois ans de cette aggravation.

Lorsque l’auteur des faits est condamné à verser des dommages intérêts, ce délai d’un an court à compter de l’avis donné par la juridiction à la partie civile (victime) qu’elle peut être indemnisée devant la commission d’indemnisation des victimes d’infraction.

Si la partie civile est représentée par un avocat, l’information donnée à l’avocat est réputé faite à la partie civile elle même.

Si la partie civile est absente et n’est pas représentée à l’audience, celle-ci doit être informée par le moyen d’un formulaire joint au jugement de condamnation à verser des dommages intérêts.

A noter que la victime peut être relevée de la forclusion pour tout motif légitime ou lorsque elle n’a pas été en mesure de faire valoir ses droits dans les délais requis (cas de blessures graves par exemple) ou lorsqu’elle subie une aggravation de son préjudice.

A noter qu’en cas d’aggravation de son état, la victime peut saisir à nouveau la CIVI sans que lui soit opposée la forclusion de son action d’origine.

Pour les mineurs ces délais sont suspendus pendant leur minorité car aucun texte n’écarte l’application de la suspension de la prescription au profit des mineurs au délai édicté (Civ 2e 18 mars 1998).

Une demande d’aide judiciaire suspend aussi ces délais de saisine de la CIVI.

La demande d’indemnité accompagnée des pièces justificatives est déposée au greffe de la CIVI, installé auprès du tribunal de grande instance.

Un fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et autres infractions, partie à la procédure, reçoit alors communication de cette demande et présente une offre d’indemnisation retraçant l’ensemble des postes de préjudices dans un délai de deux mois à compter de la réception.

La victime peut accepter l’offre ainsi faite et un constat d’accord est homologué par le président de la commission.

En cas de refus de l’offre par la victime, l’affaire se poursuit.

Toute audition ou investigation utile peut être diligentée par la commission ou son président qui peuvent se faire communiquer auprès de tierces personnes notamment publiques des informations qui ne peuvent être utilisés à d’autre fins que l’instruction de la demande d’indemnité et sans que le secret professionnel ne puisse leur être opposé (informations professionnelle, fiscale, financière).

Au cours de l’instruction de l’affaire, une provision peut être accordée dans un délai bref (un mois).

La commission rend sa décision en chambre du conseil (audience non publique).

La commission d’indemnisation des victimes d’infraction permet donc à la victime de ne pas attendre la conclusion d’une procédure pénale pour être intégralement indemnisée.

En outre, la commission d’indemnisation des victimes d’infraction permet à la victime d’être indemnisée même si l’auteur de son dommage est resté inconnu ou est insolvable !

Mais plus encore, cette procédure permet à la victime d’être indemnisée en l’absence de tout procès pénal, comme étant une procédure totalement indépendante de la procédure devant la juridiction pénale (sauf cas rares ou la faute de la victime a été en relation causale avec son préjudice, ou si la commission n’est pas en mesure de déterminer si les faits à l’origine du préjudice constituent une infraction, dans ces deux cas, la commission peut sursoir à statuer (attendre) jusqu’à décision définitive de la juridiction répressive.

Incontestablement, la commission d’indemnisation des victimes d’infraction est un outil central à la disposition des professionnels accompagnant les victimes d’infraction sur le chemin de la réparation de leurs préjudices, de la reconnaissance de leur qualité de victime, et peut être aussi de leur réhabilitation prise dans son sens le plus simple, à savoir le fait de rétablir une personne dans une situation antérieure ou dans ses droits, en la relevant de déchéances ou d’incapacités.

Pour terminer, la CIVI alloue une certaine somme au requérant au titre des frais irrépétibes, dont font partie les frais d’avocat.

Pour une information complète voir code de procédure pénale articles 706-3 et suivants et R 50 -1 et suivants.

Si vous pensez pouvoir saisir la commission d’indemnisation sans l’aide d’un professionnel, téléchargez le formulaire  de saisine de la CIVI (imprimé Cerfa.

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