obligation d’information : Cour de Cassation et Conseil d’Etat : convergences et divergences

Si l’information n’est pas requise en cas d’urgence, d’impossibilité ou de refus du patient d’être informé, la seule circonstance que les risques ne se réalisent qu’exceptionnellement ne dispense pas les médecins de leur obligation.

voir CE 5 et 4ième ss sect. 24 septembre 2012, 339 285,

Le conseil d’Etat persiste à exiger du médecin une information sur les risques exceptionnels, alors que la loi kouchner du 4 mars 2002 ne l’exige plus (article L 1112-2  CSP, « risques fréquents ou graves, normalement prévisibles » dans les suites de CE 2 juillet 2010, 323 885.

Le conseil d’Etat persiste dans l’exigence de la démonstration par la victime, que le manquement à l’obligation d’information par le médecin lui à fait perdre des chances de se soustraire au risque lié à l’intervention en refusant que l’intervention soit pratiquée.

On connait sur ce point la décision contraire de la Cour de Cassation, qui juge que le manquement à l’obligation d’information par le médecin cause un préjudice autonome au patient, que le juge ne peut laisser sans réparation (case 1ère 3 juin 2010, 09-13591 commenté plus bas).

Le Conseil d’Etat rejoint ici les décisions de la Cour de Cassation Cass Civ 1ère, 11 mars 2010, 09-11.270) en décidant qu’en présence d’une accident médical non fautif et d’une faute d’éthique/manquement à l’obligation d’information L’Oniam doit indemniser les conséquences de l’accident médical non fautif sans pouvoir se retrancher derrière la faute du professionnel de santé quant à l’information délivrée.

L’Oniam ne peut donc se retrancher derrière une faute d’éthique ni devant le juge administratif, ni le juge judiciaire.

Le non-respect du devoir d’information cause à celui auquel l’information était légalement due un préjudice que le juge ne peut sur le fondement de l’article 1382 du code civil laisser sans réparation

Cour de Cassation chambre civile 1, Audience publique du jeudi 3 juin 2010, N° de pourvoi: 09-13591

Vu les articles 16, 16-3, alinéa 2, et 1382 du code civil ;

Attendu qu’il résulte des deux premiers de ces textes que toute personne a le droit d’être informée, préalablement aux investigations, traitements ou actions de prévention proposés, des risques inhérents à ceux-ci, et que son consentement doit être recueilli par le praticien, hors le cas où son état rend nécessaire une intervention thérapeutique à laquelle elle n’est pas à même de consentir ; que le non-respect du devoir d’information qui en découle, cause à celui auquel l’information était légalement due, un préjudice, qu’en vertu du dernier des textes susvisés, le juge ne peut laisser sans réparation ;

Attendu que pour écarter toute responsabilité de M. Y… envers M. X…, l’arrêt, après avoir constaté le manquement du premier à son devoir d’information, retient qu’il n’existait pas d’alternative à l’adénomectomie pratiquée eu égard au danger d’infection que faisait courir la sonde vésicale, qu’il est peu probable que M. X…, dûment averti des risques de troubles érectiles qu’il encourait du fait de l’intervention, aurait renoncé à celle-ci et aurait continué à porter une sonde qui lui faisait courir des risques d’infection graves ;

En quoi la cour d’appel a violé, par refus d’application, les textes susvisés

Arrêt de principe : La Cour de Cassation donne ici toute son autonomie au préjudice né) du manquement à l’obligation d’information qui doit être indemnisé par lui même et non au titre de la perte de chance.

La preuve du respect de l’obligation d’information ne peut reposer sur la prise de position partiale de l’expert selon laquelle « Rien ne permet de mettre en doute les affirmations du médecin… »

chambre civile 1
Audience publique du jeudi 14 octobre 2010
N° de pourvoi: 09-70221

Vu les articles 1147 et 1315 du code civil ;

Attendu que pour écarter la responsabilité de M. Y… et de M. Z… pour méconnaissance de l’obligation d’informer Mme X…, préalablement à l’intervention, des risques liés à celle-ci, la cour d’appel s’est bornée à retenir, pour chacun d’entre eux, qu’il affirmait lui avoir donné oralement tous les éléments d’information et que rien ne permettait de mettre en doute ses affirmations ; qu’en se fondant sur de simples allégations, non corroborées par d’autres éléments de preuve, elle a violé les textes susvisés ;

Ceci apparait comme une simple application de l’arrêt de principe de 1997 qui a renversé la charge de la preuve en la plaçant sur les épaules du médecin.

Cass Civ 1ère 25 février 1997
N° de pourvoi: 94-19685

Attendu qu’en statuant ainsi, alors que le médecin est tenu d’une obligation particulière d’information vis-à-vis de son patient et qu’il lui incombe de prouver qu’il a exécuté cette obligation, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;

 

Le médecin, à qui incombe la charge de la preuve de ce qu’il a informé son patient dans les conditions prévues à l’article L 1111-2 du CSP, peut s’en acquitter par tout moyens

Cass Civ 1ere 12 juin 2012, n°11- 18 928

Certains ont pu parler ici de la complaisance du juge dans l’appréciation  des éléments de preuves fournis par le médecin car si les juges ont pu constater de nombreux rendez vous au cabinet du praticien et que le patient avait déjà subi la même opération, rien ne permettait d’affirmer que le patient avait été informé pour cette arthrodèse de vertèbres du risque de survenance d’un syndrome de la queue de cheval avec paralysie des membres inférieurs…

Cet arrêt fait écho à Cass civ 1ère, 14 octobre 1997, 95-19609