Les Commissions Régionales de Conciliation et d’indemnisation

La réparation des accidents médicaux et les Commissions Régionales de conciliation et d’indemnisation (CRCI).

Chaque année des milliers de personnes sont confrontées à la survenance d’un accident médical, d’une infection nosocomiale ou encore d’un aléa thérapeutique. Se pose alors pour eux ou pour leurs ayants droits en cas de décès, la question de l’indemnisation du préjudice subi.

Quatre juridictions pouvaient déjà être saisies : la juridiction civile, la juridiction administrative, la juridiction pénale et enfin la juridiction ordinale, selon que l’acte médical avait été réalisé par un médecin libéral ou une clinique, un hôpital, ou encore selon la gravité de la faute commise.

Au delà de ces clivages, la loi du 4 mars 2002 dite loi Kouchner a crée les Commissions Régionales de Conciliation et d’Indemnisation (les CRCI) afin de faciliter la résolution des conflits entre les professionnels de santé et les victimes et surtout de permettre leur indemnisation par un établissement public, L’Office National d’Indemnisation des Accidents Médicaux ou ONIAM.

Le rôle assigné par la loi aux CRCI est double, elles ont pour rôle principal le règlement amiable c’est-à-dire l’indemnisation des accidents médicaux et un rôle secondaire de conciliation de tous litiges nés à l’occasion d’un acte médical.

Ainsi, qu’il y ait faute ou absence de faute d’un professionnel ou de l’organisme de santé, que le préjudice subi ait pour origine un acte de prévention, un acte de diagnostic ou un acte thérapeutique, les CRCI sont compétentes pour l’indemnisation du préjudice consécutif à un acte médical.

Qui peut saisir la CRCI ? La victime, ou en cas de décès, le conjoint, le concubin ou le Pacsé, les parents, les grand parents, les enfants, les petits enfants ou les frère et sœurs peuvent être bénéficiaires de l’indemnisation…après s’être procurés le dossier médical du patient détenu par le professionnel ou établissement de santé en cause.

Les victimes de vaccinations obligatoires ou contaminées par le VIH ou encore les victimes ayant subi des dommages dans le cadre de la recherche biomédicale, doivent s’adresser directement à L’ONIAM.

Pour que votre dossier soit pris en charge par la C.R.C.I. dans le cadre de sa mission d’indemnisation, l’affection doit présenter un seuil de gravité important : il faut une I.P.P. supérieure à 24%.

Présente également le caractère de gravité mentionné au II de l’article L. 1142-1 un accident médical, une affection iatrogène ou une infection nosocomiale ayant entraîné, pendant une durée au moins égale à six mois consécutifs ou à six mois non consécutifs sur une période de douze mois, un arrêt temporaire des activités professionnelles ou des gênes temporaires constitutives d’un déficit fonctionnel temporaire supérieur ou égal à un taux de 50 %.

A titre exceptionnel, le caractère de gravité peut être reconnu :

1° Lorsque la victime est déclarée définitivement inapte à exercer l’activité professionnelle qu’elle exerçait avant la survenue de l’accident médical, de l’affection iatrogène ou de l’infection nosocomiale ;

2° Ou lorsque l’accident médical, l’affection iatrogène ou l’infection nosocomiale occasionne des troubles particulièrement graves, y compris d’ordre économique, dans ses conditions d’existence. (voir décret 2011/76 du 19 janvier 2011)

Par ailleurs, seuls les actes médicaux réalisés à compter du 5 septembre 2001 peuvent bénéficier de la procédure d’indemnisation devant les CRCI .

Aucun seuil de gravité de l’affection n’est exigé dans le cadre de la mission de conciliation des conflits entre les professionnels ou établissements de santé et les victimes.

Quand peut on saisir la CRCI ? Pendant un délai de 10 ans à compter de la consolidation du dommage, toutes les victimes d’un accident médical peuvent en principe bénéficier de ce dispositif.

La saisine de la CRCI suspend les délais de prescription et de recours devant les tribunaux (sauf devant la juridiction pénale) jusqu’au terme de la procédure de règlement amiable devant la CRCI.

La Cour Administrative d’appel de Lyon a même jugé que faute pour le CHU d’informer le patient lors d’une décision express de rejet de ce que la saisine de la CRCI suspend le délai de recours contentieux, celui ci ne courre pas et le CHU ne peut soulever la fin de non recevoir tirée d’un recours tardif : Voir CAA LYON 11 octobre 2012 N° 10LY02755

Cependant, seules les victimes d’accidents médicaux dont les séquelles dépassent le seuil d’incapacité rappelé ci-dessus pourront bénéficier du régime d’indemnisation.

Comment peut on saisir la CRCI dans le cas d’un préjudice supérieur au seuil de gravité ? Le dossier doit être adressé au moyen d’un formulaire Cerfa n°12245*02, disponible sur le site www.oniam.fr, adressé à la commission par lettre recommandée avec accusé de réception ou déposé au secrétariat de la commission contre remise d’un récépissé. Ce formulaire requiert des informations précises et indique les pièces à fournir.

La Commission accuse réception du dossier, réclame les pièces éventuellement manquantes, et peut se déclarer incompétente notamment si les dommages subis ne présentent pas le caractère de gravité requis.

Si la commission s’estime compétente, elle informe alors par lettre recommandée avec accusé de réception le professionnel, l’établissement dont la responsabilité est mis en cause, le cas échéant, par le demandeur.

Toute autre procédure engagée pour les mêmes faits devant une autre juridiction doit être signalée à la CRCI de même que toute prestation reçue par le patient.

La CRCI territorialement compétente est celle de la région dans laquelle exerce le professionnel de santé ou l’établissement concerné par l’acte en cause.

Comment fonctionne la CRCI ?
La CRCI favorise la résolution des conflits, dans le cadre de sa mission de conciliation, entre usagers et professionnels de santé en procédant à l’audition des parties, en délégant l’un de ses membres ou un médiateur indépendant.

La CRCI diligente une expertise médicolégale gratuite dans le cadre de sa mission de règlement amiable et d’indemnisation, au cours de laquelle il est vivement conseillé de se faire assister de son médecin conseil et de son avocat.

Le rapport d’expertise comportera la reconnaissance éventuelle d’une faute, d’une infection nosocomiale ou d’un aléa thérapeutique et d’autre part l’évaluation des différents préjudices de la victime : (I.P.P., souffrances endurées, préjudice esthétique …).

Ce rapport d’expertise sera d’une grande utilité pour obtenir dans certains cas une provision voire engager une éventuelle procédure devant les tribunaux, même si la vocation de cette procédure est d’éviter d’aller devant les tribunaux.

Attention, le juge judiciaire ou administratif peut refuser l’organisation de nouvelles opérations d’expertises après une procédure CRCI, voir Décision de la Cour Administrative d’appel de Lyon du 15 mai 2009.

Après audition éventuelle des parties, la CRCI rend un avis dans les 6 mois de sa saisine (le dossier doit être complet) sur les causes, la nature et l’étendue des dommages ainsi que sur le régime de responsabilité applicable.

L’avis de la CRCI est transmis au demandeur par lettre recommandée avec accusé de réception et aux parties en cause ainsi qu’à leurs assureurs respectifs, et à l’ONIAM, l’Office National d’Indemnisation des Accidents Médicaux, chargé du paiement de l’indemnité.

Si la commission conclut à l’existence de la responsabilité du professionnel ou de l’établissement de santé, l’assureur doit dans un délai de 4 mois suivant la réception de l’avis faire une offre d’indemnisation à la victime.

Si l’assureur ne fait pas d’offre satisfaisante dans les 4 mois ou si le professionnel de santé n’est pas assuré, la victime ou ses ayant droits peuvent alors s’adresser à l’ONIAM par lettre recommandée avec accusé de réception. L’ONIAM se substitue alors à l’assureur pour établir une offre et indemniser le demandeur dans les mêmes délais. L’ONIAM pourra se retourner par la suite contre l’assureur en cause.

Si la commission conclut à un aléa thérapeutique, c’est-à-dire si le préjudice n’est pas lié à la faute d’un professionnel, l’indemnisation de la victime est alors pris en charge par l’ONIAM à condition que le préjudice dépasse le seuil de gravité fixé par décret.

Attention, l’acceptation de l’offre d’indemnisation par la victime vaut transaction au sens de l’article 2044 du code civil et prive celle-ci de tout recours devant un tribunal civil ou administratif.

Si la victime conteste l’offre de l’assureur ou en cas d’absence d’offre de l’ONIAM ou de son insuffisance, la victime peut alors saisir la juridiction compétente et l’ONIAM devient alors défendeur à la procédure si le dommage est de son ressort.

Le juge a alors l’obligation de mettre en cause , au besoin d’office l’ONIAM si la victime ne  l’a pas fait dès lors que le dommage peut être indemnisé par la solidarité nationale. voir CE du 30 mars 2011 n° 320581.

Pour finir, la création par la loi Kouchner des CRCI et de l’ONIAM, constitue une avancée incontestable des droits du patient et améliore incontestablement le régime d’indemnisation des victimes d’accidents médicaux (rapidité, gratuité, indemnisation de l’aléa thérapeutique, suspension des délais de procédure…). Cependant, bien que non obligatoire, l’assistance de professionnels avisés (médecin, avocat) pour s’adresser à la CRCI au détriment du tribunal compétent est un atout à ne pas négliger.

Pour toute information, un numéro Azur 0 810 51 51 51 a été mis en place afin de répondre aux questions des usagers du lundi au vendredi de 14h à 20 heures.